eugénisme dans l'art tpe
eugénisme dans l'art tpe
De quelle manière l'eugénisme est-il représenté dans les oeuvres artistiques et littéraires au cours du XXème siècle ?
Histoire de l'eugénisme
Les idées eugénistes remontent à l'Antiquité. Elles ont traversé les époques, sous différentes formes, sans être pour autant appliquées. C'est au XIXéme siècle que le terme d'eugénisme est inventé et théorisé, jusqu'à connaître les applications les plus terribles, en particulier sous le régime nazi.
1) Des prémisses dès l'Antiquité
Dans l’Antiquité, l’eugénisme existe sous forme d’une idée, et cela avant même de porter un nom. Par exemple, Plutarque affirme que Sparte au VIIème siècle avant J.-C. possédait une législation selon laquelle lesnouveaux-nés étaient examinés par les anciens pour les « évaluer ».
Au IVème siècle avant J.-C., Platon, dans le Livre V de La République , décrivait alors une politique destinée à éviter qu'une union se fasse au hasard dans la cité. Il évoque une société parfaite dans laquelle les unions seraient réglées, et les couples formés en fonction du potentiel de chacun. Il parle ainsi de « sujets d'élite » et de « sujets médiocres ». Il faudrait, selon lui, « rendre les rapports très fréquents entre les hommes et les femmes d'élite, et très rares, au contraire, entre les sujets inférieurs de l'un et l'autre sexe », et, d'autre part, faire en sorte que les « sujets médiocres se trouvent écartés (des unions avec les sujets dits supérieurs) », afin de « conserver sa pureté à la race des gardiens ».
« Il faut selon nos principes, rendre les rapports très fréquents entre les hommes et les femmes d'élite, et très rares, au contraire, entre les sujets inférieurs de l'un et l'autre sexe. De plus, il faut élever les enfants des premiers et non ceux de seconds, si on veut que le troupeau atteigne la plus haute perfection. » PLATON, La république.
Aristote, dans les livres VII et IV de Politique, expose ses idées sur la sélection des individus afin d'obtenir une espèce plus résistante. Il va plus loin que Platon, proposant d'interdire aux citoyens de « prendre jamais soin de ceux qui naîtront difformes », allant même jusqu'à déclarer qu'il « faudra provoquer l'avortement ».
« Pour distinguer les enfants qu'il faut abandonner, et ceux qu'il faut élever, il conviendra de défendre par une loi de prendre jamais soin de ceux qui naîtront difformes ; quant au nombre des enfants, si les moeurs répugnent à l'abandon complet, et qu'au delà du terme formellement imposé à la population, quelques mariages deviennent féconds, il faudra provoquer l'avortement avant que l'embryon ait reçu le sentiment et la vie. Le crime, ou l'innocence de ce fait, ne dépend absolument que de cette circonstance de sensibilité et de vie. » ARISTOTE, Politique.
Ces deux philosophes, dès l'Antiquité, envisagent donc la possibilité de créer une société basée sur la sélection contrôlée des individus, proposant là les prémisses d'une idée qui ne cessera de faire son chemin, jusqu'à ce qu'on lui donne un nom : l'eugénisme.
2) Théorisation et applications depuis le XIXème siècle
a) La naissance d'une nouvelle théorie
Le terme d'eugénisme a été employé pour la première fois par le scientifique britannique Francis Galton en 1883, cousin de Charles Darwin.
Eugénisme signifie «bien naître», provenant du grec ancien «eu» qui signifie «bien» et «genos» qui signifie «naissance, lignée». Mené par des scientifiques et des médecins, le mouvement de l'eugénisme se met en place au XIXème siècle afin d'éradiquer les caractères jugés handicapants ou de favoriser les caractères jugés bénéfiques chez les «meilleurs» individus, dans le but de déterminer les conditions les plus favorables à la procréation de sujets sains et d'améliorer la race humaine pour tendre vers un idéal déterminé.
Au XIXème siècle, la révolution industrielle galopante entraîne une urbanisation mal contrôlée et un appauvrissement de certaine couches de la population, aboutissant à leur rassemblement dans de mauvaises conditions d'hygiène, provoquant de nombreuses maladies, infectieuses, mentales, troubles du comportement, alcoolisme, délinquance, etc. Tous ces facteurs étaient considérés, dans la haute société victorienne, comme autant de formes d'une "sélection sociale", d'évolution rétrograde, qui font échec à la sélection naturelle, condamnant les sociétés "civilisées". Selon les scientifiques de cette époque, considérée comme celle du progrès, ces maux ne pouvaient alors s'expliquer que par la « dégénérescence ». Ils n'hésitèrent pas alors à détourner les thèses sur la sélection naturelle que Darwin expose dans son Origine des Espèces, postulant que c'était l'absence de cette sélection naturelle qui était responsable de cette dégénérescence. Ainsi, nacquit l'idée que la science pourrait la corriger par un substitut de cette sélection : l'eugénisme. Le racisme social constituait donc l’une des bases de la naissance l’eugénisme.
Parallèlement, plusieurs thèses très apparentées se développent alors :
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le darwinisme social, qui prétend rétablir dans la société la concurrence et la sélection naturelle éliminant les individus les plus faibles. Le darwinisme social est l'application de la théorie de la sélection naturelle aux populations et sociétés humaines. C'est Herbert Spencer, le philosophe anglais qui a inventé la phrase "Survival of the fittest" (la survie du plus adapté), qui est regardé comme le fondateur du Darwinisme Social.
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l'eugénisme négatif, qui vise à empêcher les individus dits inférieurs de procréer, par enferment, interdiction de mariage ou stérilisation,
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l'eugénisme positif, qui veut encourager la reproduction des êtres dits supérieurs, voire n'autoriser qu'elle.
b) L'ère des applications
L'eugénisme politique s'est d'abord principalement développé aux Etats-Unis, au moment où les progrès de la génétique lui donnèrent une sorte de caution scientifique, permettant ainsi le passage de la théorie à la pratique sociale.
Ainsi, aux Etats-Unis furent adoptées des lois sur la stérilisation de certains malades, handicapés et délinquants (en 1907 dans l'Indiana, 1909 en Californie, etc.), à partir des théories du généticien Charles Davenport, qui créa en 1909 un grand fichier de pedigrees familiaux : l'Eugenics Record Office.
De nombreux pays résistèrent à ce mouvement, mais, certainement en raison des difficultés de l'après guerre et de la crise économique dans les années 20, les barrières commencent à céder : Suisse et Canada (1928), Danemark (1929), Norvège et Allemagne (1934), Finlande et Suède (1935), se dotent à leur tour de telles législations. En France, l'eugénisme ne fut pas sélectionniste, mais plutôt hygiéniste (examens médicaux prénuptiaux, soins à la femme enceinte et au nouveau-né).Les années 30 furent donc la grande époque de l'eugénisme, y compris aux Etats-Unis où les stérilisations se multiplient. En Angleterre, pays où l'idéologie s'est d'abord développée avec le plus de vigueur, aucune loi eugéniste ne fut jamais votée.
L'eugénisme fut souvent étendu à la délinquance et aux conduites immorales, et ce sont les classes pauvres qui furent essentiellement touchées. Il prend rapidement une coloration raciste. Aux Etats-Unis, les Noirs étaient plus facilement visés que les Blancs, en Allemagne on stérilise les métis, on interdit les mariages « interraciaux ».
Cela revient donc au racisme et à l'ethnocentrisme et risque d’aboutir à la discrimination. La normalisation entraîne l’uniformité. Or, biologiquement, l'uniformité est mauvaise car la diversité est un atout, tant du point de vue de la survie d’une espèce que de l’équilibre d’un écosystème. De plus, moralement, la normalisation est une atteinte à la dignité humaine. Elle entraîne la perte de l'identité personnelle.
C'est pourquoi l'eugénisme comme doctrine idéologique et pratique d'Etat est un crime contre l'humanité qui va à l'encontre de l'article premier de la Déclaration des Droits de l'homme : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. »
C'est dans l' Allemagne nazie que l'application de l'eugénisme d'Etat fut la plus virulente.
3) Eugénisme et nazisme
« La race aryenne nordique est détentrice de toute culture, la vraie représentation de toute l'humanité et c'est par application divine que le peuple doit maintenir la pureté de la race. La race germanique est supérieure à toutes les autres et la lutte contre l’étranger, contre le juif, contre le slave, contre les races inférieurs est sainte. »
« En résumé, le résultat de tout croisement de races est toujours le suivant : abaissement du niveau de la race supérieure; régression physique et intellectuelle, et, par suite, apparition d'une sorte de consomption dont les progrès sont lents mais inévitables. Amener un tel processus n'est autre chose que pécher contre la volonté de l'Eternel, notre Créateur. »
Adolf Hitler, Mein Kampf, 1925
L'eugénisme nazi se développe pour « sauver » la race aryenne.
a) Eugénisme négatif: une idéologie poussée à l'extrême
Le concept de la race aryenne n'est pas issu des partisans hitlériens, mais d'une croyance du milieu du XVIIème siècle selon laquelle les peuples parlant les langues indo-européennes (germaniques, romanes, celtes et grecques) et leurs descendants constitueraient une race distincte. Les nazis considéraient cette race comme supérieure à toute autre, en donnant une image « idéale » : individus blancs, grands, forts, cheveux blonds et yeux bleus, traits droits.
Afin de contrôler le peuple, le régime nazi avait besoin d'un idéal que tous devaient suivre. L'Aryen représente cet ideal humain, la perfection absolue. C'est le modèle sur lequel tous les hommes étaient sensés s'appuyer, la personne dont chacun devait s'inspirer pour être un parfait citoyen sous le Troisième Reich.
Le but du régime nazi est alors tragiquement simple : préserver la pureté de cette race supérieure.
Dès juillet 1933, une loi sur la prévention des descendances de personnes atteintes de maladies héréditaires est adoptée, imposant la stérilisation obligatoire des personnes présentant des troubles héréditaires tels que l'épilepsie, la cécité, la schizophrénie et de manière générale l'arriération mentale. Pour la mettre en application, l'eugénisme est enseigné, des cours de santé héréditaire sont mis en place dans les universités et écoles de médecine, et les médecins sont tenus de signaler tout individu nécessitant la stérilisation. Cette loi aboutit à la stérilisation contrainte de près de 400 000 personnes entre 1934 et 1945. 70 000 d'entre elles furent gazées en 1940-1941 dans des centres spéciaux : c'est la funeste opération Euthanasie Aktion T-4, abandonnée en 1941 sous la pression de l'opinion publique.
Mais l'extermination reprit ensuite sous d'autres formes. En 1935, les lois raciales de Nuremberg de « protection du sang allemand et de l'honneur allemand », qui interdisaient les mariages et relations sexuelles entre juifs et citoyens allemands, étendirent l'eugénisme aux caractéristiques raciales et ethniques.
1935: les lois sur la protection du sang allemand dites lois de Nuremberg.
« 1. Les mariages entre Juifs et sujets allemands ou assimilés sont interdits. Les mariages qui seraient célébrés en contravention de cette loi seront déclarés nuls.
2. Les relations [sexuelles] entre Juifs et sujets de sang allemand ou assimilés, en dehors du mariage, sont interdites.
3. Les Juifs n'ont pas le droit d'employer au service de leur ménage des femmes de sang allemand ou assimilé de moins de 45 ans.
4. Il est interdit aux Juifs de hisser les couleurs nationales du Reich. »
La stérilisation forcée figurait parmi les méthodes préconisées pour régler le « problème » de la procréation des Juifs, des Tziganes. Considérée comme trop difficile à mettre en œuvre, l'idée fut rejetée, et on lui préféra l'élimination, en s'appuyant sur le personnel et les méthodes de l'opération T-4. La solution finale est mise en place : ayant défini certaines populations comme appartenant à des catégories dites de « sous hommes », ou présentant des risques génétiques ou raciaux pour la nation et la « pureté de la race », le régime et ses médecins considéraient ces êtres « inférieurs » comme pouvant être incarcérés, stérilisés, puis exterminés. Cette effroyable entreprise était le prolongement des mesures eugéniques visant à purger la société de ses « sous-hommes ». Près de 6 000 000 de personnes périrent.
Un autre aspect de l'eugénisme nazi est l'institution du Lebensborn, que nous étudions ici à travers l'ouvrage de Boris Thiolay, Lebensborn, la fabrique d'enfants parfaits.
b) Eugénisme positif : le Lebensborn (Quelques image du Lebensborn en annexes.)
« Hommes de la SS, et vous, mères des enfants dont l’Allemagne a besoin, prouvez que, si vous êtes prêts à combattre et à mourir pour l’Allemagne, vous l’êtes aussi à transmettre la vie pour elle. » Heinrich Himmler, 1939.
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Présentation de l’œuvre dans son contexte historique
Ce livre est un documentaire retraçant l’incroyable destin de ces nombreux enfants nés des Lebensborn, à l’époque de l’apogée nazie pendant la Seconde Guerre mondiale. Lebensborn, « fontaines de vie » en français, est le nom poétique de ces maternités traduisant la folie nazie charriant l’imagerie liée à la fascination pour le MAL. Cette œuvre s’intéresse plus particulièrement aux français issus des ces matrices du monde et aussi paradoxalement que cela puisse paraître, beaucoup d’entre eux en naquirent.
Le parcours de ces enfants est tout aussi fou que celui du projet politique d’eugénisme nazi, dont ils sont les premières victimes. Les faits historiques retracent leur parcours de la naissance jusqu'à la mort. Certains ne connaîtront jamais leur origine, ni même leurs parents. L’œuvre traite de l’origine et l’utilisation de ces maternités SS mises en places par les nazis avec comme but de créer une « race supérieure de Germains nordiques ». Les enfants qui naquirent dans ses maternités répondaient aux critères de la race aryenne : ce sont des enfants « parfaits », aux cheveux blonds et aux yeux bleus. Boris Thiolay à travers son enquête, a réussi à produire une œuvre de qualité résumant le projet fou des Lebensborn, à des fins d'organisation criminelle.
C'est en décembre 1935 que l'association des Lebensborn fut fondée. Un an plus tard, en 1936, le premier Lebensborn voit le jour, imaginé par le Reichsführer-SS Henrich Himmler dans le cadre de la politique d'eugénisme nazie. C’est alors que s’engage un véritable combat nazi dans la recherche permanente de « faire grossir les rangs de la race supérieure ». Celle-ci s’accompagne d’actes les plus odieux de l’humanité où la seule chose qui comptait était l’apparence physique de ces bambins « programmés pour changer la face du monde … ». Ils échappaient au génocide et au massacre réservés aux juifs, tziganes ainsi qu’aux autres peuples. Néanmoins l’avenir auquel ils allaient être confrontés, n’était pas plus rose.
« Car l’essentiel est là : les « Fontaines de vie » sont indissociables de la machine de mort nazie. »
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L’idéologie nazie
Pour les nazis, contribuer à la prolifération de la race est une mission sacrée, c'est pourquoi depuis la seconde moitié du XIXème siècle, des théories de pseudo-scientifiques ont été fondées sur les travaux de Darwin appliquant la sélection naturelle. L'idée d'une hiérarchie entre les races a renforcé le terreau de l'antisémitisme et à consentir les Aryens comme un peuple de surhommes.
« Ces guerriers grands et blonds, aux pouvoirs surnaturels. »
Le jeune historien spécialiste de la médecine nazie et de l’eugénisme, Georges Lilienthal consacre sa thèse dans laquelle il démontre remarquablement la mécanique de l'organisation des Lebensborn. Le but final des nazis est « de créer pour l'Allemagne, dans les siècles à venir, une caste supérieure élue, une nouvelle noblesse, dont les rangs seront constamment grossis parmi les meilleurs fils et filles de notre peuple, une noblesse qui jamais ne vieillira, qui remontera dans la tradition et le passé (…) jusqu'aux époques les plus sombres et qui insufflera une jeunesse éternelle à notre peuple. »
Le cycle de reproduction des Lebensborn fut lancé et ne cessa de se proliférer tout en se perfectionnant. Entrainant avec elle les actes les plus odieux de l’humanité en commençant par l’extermination des juifs et tziganes. En voici les étapes les plus marquantes :
Mars 1933 Deux mois après l’accession au pouvoir d’Hitler, le premier camp de concentration est ouvert, à Dachau, prés de Munich.
Janvier 1934 Une loi impose la stérilisation forcée aux personnes souffrant de maladies considérées comme héréditaires. 400 000 allemands y seront soumis.
Septembre 1935 A Nuremberg, les lois de « protection de sang allemand et de l'honneur allemand », interdisant les mariages et relations sexuelles entre juifs et citoyens allemands sont promulguées.
9 et 10 novembre 1938 Lors du pogrom de la Nuit de Cristal, des milliers de commerces et d’entreprises juives sont saccagés, plus de 250 synagogues détruites, une centaine de juifs assassinés et au moins 25 000 sont envoyés en camp de concentration.
Automne 1939 Mise en place en Allemagne de la mort « miséricordieuse », un programme d’euthanasie, en fait d’assassinat, qui touchera 150 000 personnes aliénées ou handicapées.
Ces étapes ont permis aux dirigeants des Lebensborn d’éviter un maximum de « parasites » dans la prolifération de la « pure race ». En effet, l’obsession était de savoir que la progéniture aryenne était en bonne santé en se souciant du moindre problème pouvant affecter sa prolifération. C’est pourquoi la perte de « ce bon sang » leur était intolérable.
« Himmler, féru de mystique et d’occultisme nourrit une obsession maladive : redonner à la « race » allemande sa supposée pureté originelle (…) elle doit devenir « une troupe qui rassemble le meilleur matériau humain que l’on peut trouver en Allemagne (…) toute dégénérescence doit être impossible. »
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L'utilisation de l’eugénisme
La SS, l'ordre noir définit le projet de futurs « troupes rassemblant le meilleur matériau humain que l'on peut trouver en Allemagne » et aucune dégénérescence ne doit être possible. Les recrues pour la reproduction massive doivent passer une visite médicale comprenant des mesures anthropométriques effectuées par les Rassenprüfer, les examinateurs de race. Elles doivent correspondre à des critères très précis. Ces mesures s'appliquent aussi aux épouses SS. Les couples ne peuvent se marier que s'ils remplissent les critères de reproduction ne mettant pas en danger l'avenir de la race. C'est à dire que « l'harmonie » entre les deux individus et la capacité à avoir une descendance « racialement valable » est évaluée.
La volonté d’obtenir un peuple riche et nombreux se manifeste en demandant aux hommes de procréer en dehors du mariage, ceci encouragé par le Reich. Les femmes doivent être dévolues au rôle de mère au foyer en offrant à Adolf Hitler un maximum de nouveau-nés (4 enfants minimums par femme). Georges d’Heucqueville, praticien eugéniste réputé dans les années 1930, écrit en 1943 un livre au titre explicite Plus d’enfants dégénérés, dans lequel il rend « hommage aux puissants travaux des savants allemands », appliquant le remède « héroïque » permettant aux hommes de « détruire dans leur sein le germe taré, par stérilisation des porteurs de maladies héréditaires. »
« L’amélioration et le renforcement de la race aryenne/nordique par tout les moyens. »
La volonté des nazis de procréer cette race est poussée à l’extrême et mène jusqu’au point où certains considèrent les Lebensborn d’ « haras humain » ou encore de « bordels SS ».
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Le fonctionnement des Lebensborn : « Obtenir un peuple aryen nombreux à tout prix. »
Ces maternités accueillaient des femmes enceintes de membres de la SS mais aussi de nombreuses femmes tombées enceintes de soldats SS. Ces femmes sont de nationalités très différentes : surtout des femmes de l'Est mais aussi des françaises. Même si le peuple français est qualifié de « peuple abâtardi issu de sang mêlé et donc non valable », les naissances issues d'union entre les femmes françaises et les officiers allemands sont nombreuses. L’origine de l’enfant importait peu, à partir du moment où ils étaient soumis à la « germanisation ». La germanisation de l'enfant s’effectuait par le rite aryen de purification du nom. Le prénom était soumis à la bénédiction de nom, un rituel SS inventé par les nazis. Les prénoms féminins faisaient référence aux héroïnes des épopées guerrières nordiques et les prénoms masculins évoquaient la pudeur, la dignité et la respectabilité.
Après l'accouchement les mères qui ne souhaitaient pas garder leur enfant pouvaient les abandonner auprès des autorités allemandes ou bien le garder et partir vivre en Allemagne. On dénombre près de 11 000 enfants illégitimes. La Norvège était le « bassin de la race ».
« Lebensborn (…) ses procréations hors mariage. »
Pour de nombreux orphelins, leur vie fut heurtée, leurs origines ignorées. Beaucoup ont vécu dans l’anonymat et l’ignorance totale. Seuls les plus téméraires et courageux arrivaient à l’âge adulte. Ils se battaient afin de se reconstruire leur histoire et de savoir d’où ils venaient. Avec le temps, les enfants de ces foyers devinrent des parias que l’Allemagne cherchait à oublier. Mais la STASI s’intéressa de près au sort de ces enfants. En effet, un plan cynique fut mis en place : l’identité de ces enfants était donnée aux espions de la STASI. Ainsi munis d’une fausse identité et grâce à des récits reconstitués de toutes pièces, ils infiltraient les pays occidentaux, arguant de leur désir de renouer avec leur famille et de retrouver leur racine. Ces prétendus enfants s’installaient durablement à l’étranger et se construisaient une double vie. Parallèlement leur double (ou la vraie identité) était étroitement surveillé et les tentatives de se renseigner sur leurs racines méthodiquement découragées.
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Les conséquences désastreuses de la folie nazie
Il y eu un nombre innombrables d’orphelins. Leurs origines étaient très confuses, ils étaient nés en France, Norvège, Danemark … avec comme but de les germaniser et furent ramenés en Allemagne. Leur identité était falsifiée, leur prénom avait changé plusieurs fois, ils furent renvoyés dans un pays par erreur et une langue leur furent donnée en fonction de leur bégaiement.
L’incroyable destin de sœur Annick et ses sœurs ne sont qu’un exemple parmi tant d’autre. Tout d’abord, certains prénoms furent changés par l’assistance publique, comme celui d’Anika remplacé par Annick. Ceci ne facilitera pas les recherches, quant ils seront arrivés à l’âge adulte.
Ensuite, de nombreuses erreurs furent commises par les dirigeants des Lebensborn lors de l’attribution d’identité qui falsifiait toute origine véritable. Sœur Annick en connut les conséquences. Devenue adulte, elle mena des recherches périlleuses et de longue haleine, pour enfin découvrir qu’elle avait eu une existence officielle qu’à partir de 1947, soit vers l’âge de 7 ans ! Mais aussi qu’elle avait trois frères et sœurs dont elle ignorait l’existence et qui grandirent tous séparés des uns des autres, sans jamais connaître leurs parents. A 68 ans, elle découvrit qu’elle était destinée à faire grossir les rangs pour créer une race supérieure qui régnerait sur le monde alors que ses sœurs étaient destinées à être les enfants de couples de « sous-hommes », vouées à travailler jusqu’à la mort pour les nouveaux maîtres aryens.
Ce récit n’est malheureusement pas une exception. Comment peut-on avoir vécu avec cette part d’ignorance ? Comment se construire après la découverte de la vérité ? Voici tant de questions devant lesquelles nous, spectateurs, demeurons impuissants et dont ces familles en sont victimes.
« La petite troupe de bambins ballottée comme des paquets. »
« Des bébés furent arrachés à leur mère, leur identité fut occultée. Ils furent élevés en groupe, en animaux apeurés. »
Le livre de Boris Thiolay nous a présenté le programme nazi de la purification de la race, où l'eugénisme fut utilisé à des fins extrêmes livrant des milliers d'enfants à eux mêmes. Ils sont la preuve vivante de la folie nazie. On estime à 11 000 le nombre d'enfants qui naquirent dans les maternités des Lebensborn entre 1936 et 1945. Le but était juste de grossir les rangs de la race supérieure. Ces enfants ne sont mêmes pas beaux et ne répondent pas aux critères de la race. Cette folie résulte d’un véritable échec.
« Les apprentis du Lebensborn ont échoué à créer une super-race nordique. »
Ces enfants ont beaucoup souffert. Ils s’exprimaient par petits cris et onomatopées. C’est l’une des conséquences de l’éducation reçue. De plus, élevés en groupe par des infirmières nationalistes-socialistes, enlevés à leur mère et n’ayant jamais connu leur père, ils se comportaient parfois comme des animaux. Beaucoup d’entre eux auraient développés des carences physiques et psychologiques, devenant « des malades mentales ». A la fin de la Seconde guerre mondiale dans une Allemagne dévastée, des milliers d’enfants blonds, de toutes nationalités, erraient sur les routes, dans les ruines, avec comme seul objectif permanent, la survie.
Combien d'enfants du Lebensborn ont essuyé ce désaveu maternel du déni de leur venu au monde ? La plupart d'entre eux se firent, un jour ou l'autre traiter « d'enfants de la honte » ou de « sale boche ».
Nous pouvons associer ce livre au film D'une vie à l'autre de Georg Mass, résumant la vie d'un enfant orphelin des Lebensborn, étant le fruit d'une relation entre une norvégienne et un soldat allemand.
Les horreurs nazies firent reculer l'eugénisme après la guerre, même s'il ne disparut pas, certains pays, comme le Japon, se dotant d'une loi eugéniste en 1948. Mais au cours des années suivantes, ces lois furent de moins en moins appliquées. Dans les années 60, les avancées en biologie et en génétique entraînent un glissement vers un eugénisme de type nouveau.
4) Vers un nouvel eugénisme
Durant les cent dernières années, de grands progrès ont été faits par la médecine. Et si, auparavant, les personnes souffrant d’anomalies génétiques, de maladies graves, ou ayant un système immunitaire affaibli ne vivait pas très longtemps, l’espérance de vie a tout de même augmenté de près de 40 ans.
Aujourd’hui l’eugénisme positif a de l’avenir. La médecine ne parle plus d'eugénisme mais d'orthogénie, « ortho » signifiant droit en grec, et « geneia » veut dire génération, lignée. L'eugénisme est utilisé à des fins médicales, dans le but de soigner, guérir des malades, mais aussi « bien » naître.
Avant la naissance, le vœu de chaque parent est de mettre au monde un enfant en bonne santé, avec la possibilité de faire naître des enfants sans handicap, en décidant d'une IMG qui est une Interruption médicale de grossesse sur le fœtus, et d'éviter les naissances d'enfants porteurs de maladies héréditaires, grâce au DPI (Diagnostic préimplantatoire), qui trie les embryons en sélectionnant les meilleurs. Mais au moyen du dépistage de la trisomie 21, effectué avant la naissance. Il existe d'autres façons d'éviter les maladies, déjà aux États-Unis il est possible aux couples souhaitant de faire une fécondation in-vitro d’éviter certaines maladies. En France, les diagnostics préimplantatoires sont très encadrés, et autorisés seulement pour éviter certaines maladies très graves.
Mais vouloir mettre au monde un enfant parfait sans défauts peut révéler de sérieuses désillusions. Une nouvelle industrie propose des bébés à la carte. Avec des mères porteuses sur catalogue, et donneurs de sperme très sélectionnés. Les embryons deviennent des produits normalisés, conservés au nombre de 40 bébés par incubateur. A Los Angeles, un nouveau marché de conception en sélectionnant les meilleurs des embryons est apparu. Choisir son enfant par cette technique médicale est interdite en France comme dans beaucoup d'autres pays du monde au contraire des Etats-Unis.
Le patrimoine génétique de l’enfant parfait est devenu un véritable business avec l’apparition du marché de l'enfant sur mesure. En Chine, il existe une politique d'enfant unique où le pays est doté d'une loi eugéniste : la loi pour la protection de la mère et l’enfant, destinée à « améliorer la qualité de la population ». Il y a 20 ans que cette loi est mise en application, imposant un examen prénuptial et obligeant de mettre un terme à une grossesse dont l'enfant serait susceptible d'être porteur de maladies infectieuses ou génétiques. Cette politique répondrait au risque de voir sombrer le pays.
L’eugénisme a aussi des fins purement esthétiques, de normalisation de l'apparence humaine, de création d'un homme compétitif, au corps parfait et sans âge, l'idée étant de modéliser, standardiser les processus biologiques. Cela conduit à l'uniformisation, avec la réduction de la diversité, en privilégiant une certaine forme de vie ou en valorisant certains critères. Définir la normalité reviendrait à exiger que l’individu se conforme à une norme «être et faire comme tout le monde». Et ceux qui dérogeraient à cette norme seraient dévalorisés. L’idéologie qui voit l'homme comme une machine prend du terrain. Et ceci dès la naissance, car si les progrès de la science continuent ainsi, les bébés pourraient être conçus dans un utérus artificiel, nous embarquant dans un processus de dissociation entre sexualité et procréation.
En supprimant le hasard de la vie, nous en supprimerions le sens, et l'essence. La technologie pourrait ne pas nous rendre meilleurs, mais simplement peut-être moins humains. Au détriment de quoi allons-nous nous infliger ces améliorations? La biologie contemporaine révolutionne la capacité des hommes à maîtriser les caractéristiques de leurs enfants. Quelle utilisation en ferons-nous? L'histoire nous servira-t-elle de leçon? La génétique ne doit pas faire oublier l'importance de facteurs tels que l'éducation, la culture, l'environnement, les sentiments.
L' eugénisme, tout au long de son histoire, appartient à tous les courants politiques, et fut pratiqué par de nombreux états, et n'a pas fini d'évoluer et d'interroger. Le cauchemar nazi reste évidemment très pregnant dans les esprits. La création d'un «homme nouveau» allemand et la destruction des «races inférieures» étaient donc deux phénomènes indissociables de la « purification de la race » sous le Troisième Reich. La question que nous nous posons ici est de de comprendre comment le régime nazi a pu parvenir à imposer une telle idéologie de « race supérieure », avec les terribles conséquences que nous lui connaissons, à la population allemande.
L'une des pistes de réflexion est la manipulation de l'opinion publique par la propagande. Les régimes totalitaires utilisent souvent l'art pour leur propagande. C'est pourquoi, dans la partie qui suit, nous allons tenter de voir, à travers trois œuvres, comment l'art fut mis au service de l'idéologie nazie.